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Digne Dingue D’Eau

 

Il s’agit d’un film 16 mm. couleur tourné en 1977 et désormais disponible en qualité numérique sous forme d’un DVD, lequel comporte également une production plus récente « Apprendre et nager autrement » filmé en 1999 à Megève.

En 1977 conjointement, le Ministère de l’Education et celui de la Jeunesse des Sports et des loisirs, publiaient des « textes réglementaires » pour l’éducation physique et sportive et la natation à l’école élémentaire. Ce document a été diffusé dans toutes les écoles du pays.

Il contenait pour la première fois une proposition de contenu pour l’enseignement de la natation sous la forme de 17 repères.

Ecrits dans le jargon des enseignants d’EPS ces textes perdaient toute lisibilité pour les enseignants de l’Ecole élémentaire sollicités pour conserver la responsabilité pédagogique de leur classe en piscine.

L’idée de rendre explicites les propositions pédagogiques au moyen d’un film fut confiée à la commission d’Etudes et de formation des cadres de la Fédération française de Natation dont je faisais partie.

Pour des raisons de luminosité facilitant les prises de vues, la piscine de la ville de Manosque fut pressentie et 3 collègues professeurs d’EPS désignés pour mettre en œuvre le projet.

Très peu de temps avant la période retenue nous apprîmes que la piscine envisagée ne serait pas disponible. A la hâte un autre lieu fut proposé : la piscine de DIGNE les BAINS.

En outre mes 2 collègues se trouvèrent indisponibles. Se présente le dilemme : faut-il assumer seul la responsabilité de conduire ce projet ?

L’enjeu demeurait important : réaliser une expérience originale.

Du 9 au 18 juin 1977, toute une classe (31 élèves) d’un Cours Elémentaire (17 filles et 14 garçons) est amenée, à raison de 2 séances journalières, à vivre un enseignement de la natation. Les séances ont lieu le matin de 9 à 10 heures et l’après-midi de 15 à 16 heures.

L’assiduité complète ne sera respectée que par 8 enfants.

 

FOIS :

16

15

14

13

11

10

08

06

04

NOMBRE :

8

8

5

2

4

1

1

1

1

 

Par chance, un premier projet prévoyant un tournage « classique » dans lequel les enfants auraient « rejoué » les séquences que le maître aurait estimées « intéressantes » ne vit pas le jour et le second projet fut confié à l’équipe cinéma de l’I.N.S.E.P. qui proposa une autre stratégie : « on filmera tout sur le vif, sans préjuger de ce qui se passera ni de ce qu’il « faudrait faire voir ». Simultanément 3 caméras furent mobilisées dont une sous la surface, une autre pour les plans généraux et la dernière pour les « gros plans ».

Un impératif m’attendait au montage : nous avions des kilomètres de pellicule mais le film ne devait durer qu’une demi-heure. (L’expérience ayant prouvé qu’au-delà l’attention du spectateur se dissipait). Certains choix furent difficiles.

Les vues sous-marines me firent découvrir tout un monde qui m’avait complètement échappé pendant l’animation des séances. Elles mettaient l’accent sur le processus d’apprentissage.

Le choix des séquences devait rendre compte en une demi-heure de ce qui avait duré environ 15 heures.

L’originalité de la démarche réside le choix stratégique de la grande profondeur à laquelle toute la classe, dans sa grande diversité, sera confrontée. En outre, elle exclut dès le départ l’utilisation d’accessoires de flottaison pour permettre à chacun, de vivre une relation authentique avec l’eau. L’enseignant se refuse de constituer des « sous-groupes » et conserve l’ensemble de la classe en prenant appui sur sa « dynamique de groupe ».

La charge affective, par le biais de « l’émotion qui soude l’enfant à son entourage » se trouve élevée jusqu’à ses limites pour beaucoup.

La situation devient épreuve et chacun poursuit l’exploit, accepte ce qui dans son esprit est encore risque. Mais chaque action réussie fait du « banal » un triomphe apprécié et permet d’accéder au merveilleux, à la conquête quasi immédiate de disponibilités nouvelles.

Le rôle du groupe se révèle décisif. Le maître en fait partie avec un statut et un rôle particuliers.

L’objectif est le même pour tous mais les situations pédagogiques mettent en évidence des niveaux d’action différents.

Le groupe constitue une structure de fonctionnement qui s’auto régule par la détermination d’objectifs, la répartition des rôles et le choix des moyens.

 

Didactique

Le traitement du CONTENU pour le rendre assimilable par tous fait apparaître des « passages obligés » parce que les transformations obéissent à des déterminismes.

Chaque passage correspond à une transformation nécessaire et suppose un cheminement dont le maître tient compte pour proposer les situations pédagogiques.

Une chronologie des étapes s’oriente vers les formes les plus élaborées de la natation.

La didactique prend appui sur un modèle théorique (représentation simplifiée du fonctionnement du nageur et des processus de sa construction).

Les situations pédagogiques partent du postulat que les progrès sont nécessaires dès lors que le sujet entre dans l’action et qu’il n’y a pas d’enfants qui ne veuillent progresser, s’enrichir de capacités nouvelles, s’épanouir.

Par contre, les enfants qui momentanément ne peuvent pas, nous les rencontrons avec une fréquence notable et à leur intention devons poser les problèmes à résoudre à leur portée.

Au niveau du groupe, deux facteurs vont jouer :

  • accepter toutes les solutions à un problème posé pour permettre à chacun d’être soi

  • rechercher ensemble les solutions jugées préférables par tous pour faciliter l’intégration.

La diffusion de ce film a suscité des débats passionnés et même des rejets.

Une littérature assez conséquente y fait référence.

 

La portée du film dépasse nos frontières

En 1980, le Ministère de l’Education du Gouvernement du Québec en achète les droits pour aider à l’implantation d’un nouveau programme d’éducation physique scolaire lancé en 1981.

Un guide d’utilisation du film est alors produit en 1982 réalisé par Y. Genet et J.C. Moreau.

La trame sonore y est présentée et illustrée pour aider à une analyse séquentielle di film.

Depuis, cette trame sonore a été traduite en plusieurs langues et vous est accessible ici: français, italien, anglais, allemand, russe

L’ INSEP vient de réaliser une version numérique de ce film que vous pouvez vous procurer (cliquez ici).

Il dépendra de l’intérêt manifesté des spectateurs lecteurs pour que nous enrichissions ou abandonnions cette rubrique

Bien que tourné en 1977, ce film reste d’actualité pédagogique et constitue un progrès qualitatif par rapport aux pratiques traditionnelles encore majoritaires de nos jours dans la majorité des pays.

Il est évident que si une telle expérience était renouvelée, les progrès pédagogiques et particulièrement le recours au modèle théorique actuel (de 1992) entraîneraient un singulier dépassement de Digne Dingue d’Eau.

raymond

 

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Commentaires   

#1 gehant albert 21-05-2015 16:28
Ce que j'en pense ! j'ai eu la chance de voir cette cassette vidéo et par la suite j'ai utilisé ce qu'elle m'avait appris pendant de nombreuses années avec mes enfants de primaire (dans l'eau ce ne sont plus des élèves mais ils redeviennent des enfants). C'était GENIAL ! tous mes gamins ont pu parla suite passer le brevet et faire de la voile. Hélas un jour on m'a demandé d'avoir 25 élèves dont quinze nageurs pour avoir l'autorisation de l'inspectueur. J'ai fini par quitter l'éducation nationale . Merci encore pour tous ces gamins

Pardon, vous n'avez pas le droit pour l'instant.