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 VITESSE, AMPLITUDE, FREQUENCE : SCIENCE ET IDEOLOGIE

 

NAGER (PLUS) VITE, EN VALORISANT LA FREQUENCE DE NAGE

Zlatnik-Sorge K. (academie de Creteil),

Albertini C. (academie de Corse)

INTRODUCTION

Cette étude a pour objectif d'émettre des hypothèses de travail afin de permettre a tous les élèves d'une classe de nager plus vite. A partir de la proposition d'un outil diagnostic, 1'enjeu sera de déterminer la stratégie la plus pertinente, en terme d'augmentation de 1'amplitude ou de la fréquence de nage, pour élever la vitesse de chaque élève (Zlatnik-Sorge & Albertini, 2014).

La fréquence nous semble trop souvent délaissée alors que pour nager plus vite, à courte échéance, la solution première consiste à élever cette fréquences de nage (Pelayo & Rozier, 1998).

Notre hypothèse est que, dans le cadre de la natation de vitesse, un travail sur 1'augmentation de la fréquence de nage permettrait a un certain nombre d'élèves de gagner en vitesse.

METHODE

L'étude porte principalement sur 248 élèves de sixième (128 garçons et 120 filles) évalués dans le cadre de la compétence de niveau 1 du « nager vite » au collège. Les données recueillies sont le temps sur 25m et le nombre de coup de bras effectues sur 20 mètres (a partir de la zone des 5m) afin d'éviter «1'effet départ». Ces données, converties en vitesse (m.sec"1) et en amplitude (m.cycle!) permettent de situer chaque élève dans une cible indiquant leur indice de nage.

L'outil diagnostic et évaluatif (figure 1) fait apparaitre le thème de travail prioritaire pour chacun (amplitude ou fréquence) selon la position dans la cible, ainsi que les zones d'acquisition de la compétence du nager vite (Nl non acquis, en cours d'acquisition et acquis).

RESULTATS

Pour 18,1% des élèves testés (18,8% des garçons et 17,5 des filles), la thématique de travail prioritaire a court terme serait 1'augmentation de la fréquence de nage. (voir figure 1)

DISCUSSION

18,1% des élèves testés, a proportion équivalente de filles et de garçons, réalisent peu de mouvements de bras (moins de 26 cycles par minute). Le travail sur 1'augmentation de la fréquence concerne environ 1 élève sur 5, soit 5 ou 6 élèves par classe. II nous semble alors important de pouvoir identifier ces élèves afin de leur proposer des pistes de travail adaptées a leur profil: 1'enseignant peut ainsi agir sur 1'aménagement des conditions d'enseignement, les représentations mentales ou la structure même de la nage pour favoriser un gain en fréquence. Pour les autres élèves, un travail sur 1'amélioration de 1'amplitude de nage reste cohérent.

REFERENCES

Pelayo P., Rozier D. (1998) revue EPS N°273;

Zlatnik-Sorge K., Albertini C. (2014) revue EPS N°360.

 

REACTIONS :

 

La notion « d’amplitude » mériterait d’être définie.

Pour l’enseignant s’agit-il de mettre en œuvre une stratégie permettant au nageur de cerner et de pulser de grandes masses d’eau vers l’arrière en utilisant une force d’intensité croissante ou s’agit-il de faire de grands mouvements de bras ?

De toute évidence les auteurs de cet article ainsi que les enseignants qui ont conduit l’expérience se sont centrés sur des mouvements amples (à reproduire) plutôt que sur une série de transformations qui permettraient de passer d’un fonctionnement spontané, qui consiste à tourner les bras toujours plus vite pour nager plus vite, à un fonctionnement de haut niveau (qui consisterait à pulser vers l’arrière de grande masse d’eau avec une force d’intensité croissante).

Cloisonnés dans le domaine bio énergétique de l’activité physique, la très grosse majorité des enseignants en natation ignore la dimension informationnelle qui en est inséparable.

De ce fait, ils négligent de faire appel à l’activité perceptive indispensable à la construction de représentations de l’espace du sujet et de l’espace d’action sans lesquelles « il n’y a pas d’adaptation possible aux objets et aux buts de l’activité ».

Structurer l’espace du sujet se réalise selon un plan « proximo-distal » et implique de faire parcourir aux membres supérieurs les plans horizontal (surface de l’eau), sagittal vertical et frontal le plus lentement possible pour solliciter la fonction posturale.

Cette étape de la constitution d’un schéma-corporel du nageur venant s’ajouter au schéma terrien se révèle indispensable pour envisager l’exploitation des informations sensitivo-sensorielles dans l’élaboration de l’amplitude gestuelle volontaire.

Dès lors, aucune transformation ne pouvant être obtenue par les enseignants qui ont conduit l’expérimentation, il est évident que leurs élèves qui n’ont rien appris utilisent toujours les mêmes solutions spontanées pour nager plus vite : ils ne sont en mesure, pour nager plus vite, que de valoriser une fréquence de bras plus élevée !

L’expérience démontre à la fois l’incompétence des enseignants à obtenir de leurs élèves des transformations motrices significatives leurs permettant de nager toujours plus vite, mais aussi que la pédagogie traditionnelle (du mouvement) influence la représentation que se font les chercheurs qui ont réalisés cet article de la locomotion du nageur !

Ce dernier constat doit nous conduire à rester vigilant face à de tels articles à caractère dit scientifique.

 

Marc BEGOTTIRaymond CATTEAU

 

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Commentaires   

#1 Albertini Cyril 13-01-2018 19:58
Bonjour,
Je suis un des co-auteurs de l’article qui est commenté.
Autant, je suis en parfait accord avec le texte écrit en bleu (M. Raymond CATTEAU), autant je suis en profond désaccord avec celui écrit en vert (M. Marc BEGOTTI).
- La notion d’amplitude est définie dans un encadré en début d’article et dans nos propos elle est en lien avec l’amélioration de la vitesse de nage. A aucun moment il n’est question d’un « geste ample à reproduire ».
- Ainsi, le travail de l’amplitude de nage représente bien pour certains élèves (80 %) la solution prioritaire pour augmenter la vitesse de nage. Pour d’autres (20%), ça pourra être la fréquence de nage.
Nos propositions visaient à identifier ces profils d’élèves (au regard de leurs paramètres de nage) afin de proposer des contenus adaptés.
- Par ailleurs, à propos de votre commentaire qui souligne notre « incompétence à obtenir de leurs élèves des transformations significatives ... », je suis au regret de vous confier que je n’arrive pas trouver pareil constat dans l'étude que nous présentons... Je considère donc ce commentaire comme gratuit et déplacé au regard du fait que nous sommes tous deux professeurs agrégés spécialistes de natation.

Ceci dit, je continuerai à naviguer sur votre site que je trouve très riche et bien intéressant.

Cordialement,
Cyril Albertini
#2 marc 15-01-2018 19:42
Bonjour Mr ALBERTINI,

L’amplitude et la fréquence étant deux aspects d’une même réalité à propos de la locomotion dans l’eau, vouloir privilégier la fréquence avec des élèves m’a interpellé.

L’AMPLITUDE désigne l’espace parcouru par cycle de bras. Elle est logiquement plus grande pour le cycle comprenant l’accélération la plus forte.
La FREQUENCE c’est le nombre de fois par unité de temps.

Il appartient au nageur de gérer à chaque cycle, l’alternance propulseur projectile aux valeurs requises pour gérer la vitesse de son déplacement.
Encore faut-il que l'élève ait construit la capacité ou acquit la compétence de cerner et de pulser des masses d’eau (masse d’appui) dans la direction et en sens inverse du déplacement avec une force d’intensité croissante afin d’optimiser ses accélérations et acquit la compétence à réduire les effets de l’action de l’eau sur son corps (les résistances).

A la fin de ce même article une proposition de "piste de travail » devrait être, selon moi, sérieusement interrogée car absolument contre productive :
« Modifier le battement de jambes : battements de jambes rapides pour espérer une augmentation de la fréquence bras par contagion »

Cordialement
Marc Begotti
#3 Gérard 16-01-2018 01:43
Émoi et moi
L’ego est souvent atteint devant des remarques venant de quelqu'un d'autre.
Au risque de « se noyer dans un verre d’eau »
Pourtant il suffit d'être vigilant et lucide pour s'apercevoir que dans beaucoup de domaines on peut se trouver souvent "à côté de la plaque".
Je puis l’observer moi-même tous les jours dans diverses activités plutôt automatiques et réactives que d’actions justes.
Toutefois sachons faire la différence entre des structures qui doivent être exercées par des tâches opportunes et l’ego, ou mieux l’être, qui lui est souvent que « témoin » de ce qui se fait, avant d’en arriver à la finalité ou « l’âme dans son coin contemple le désastre » à cause d’avoir laisser faire sans exigence.
Gg
#4 Albertini Cyril 17-01-2018 12:42
M. BEGOTTI,
Bonjour,
Je viens de prendre connaissance de votre réponse et je souhaitais vous dire que je vous suivais dans vos propos.
La contagion « jambes - bras » que nous évoquons est l’une des « pistes » que nous proposons. Les pistes principales restant pour nous d’intervenir
- sur la surpression du temps de glisse (pour des élèves qui nageraient sur 25m sprint en mettant en œuvre une coordination bras en semi-rattrapé)
- ou sur le rythme, et comme vous le dites : en optimisant les accélérations en pulsant « des masses d’eau dans la direction et en sens inverse du déplacement avec une force d’intensité croissante »
La proposition de contagion « jambes - bras » est issue d’une « observation de terrain » et je ne saurais l’expliquer ou la soutenir d’un point de vue strictement scientifique. C’est une observation que j’ai eu l’occasion de faire moi même, sur le bord des bassins, et qui peut marcher (parfois) pour débloquer certains élèves (pas tous).
Je ne pense pas qu’il soit ici question d’ego, mais seulement de l’intérêt que nous partageons pour la natation et le désir de faire progresser nos élèves. Je vous remercie donc pour cette réaction et pour la richesse des propositions que vous faites sur ce site.

Cordialement
Cyril Albertini
#5 marc 19-01-2018 10:52
Mr Albertini bonjour,

Si je peux me permettre dans le seul but de progresser et pour les lecteurs

Demander d’augmenter la fréquence de bras (« augmenter le rythme ») et vouloir supprimer le « temps de glisse » n’est il pas contradictoire avec la recherche de l’optimisation des accélérations ?

A propos de « la contagion jambes-bras » :
Lorsque le nageur augmente sa vitesse de déplacement nous observons que la fréquence de ses mouvements de bras augmente et que son battement s’intensifie.

Peut-on pour autant dire que le nageur dispose de 2 moteurs pour se propulser ?

Dans l’hypothèse où c’est la force produite à l’aide des bras sur la masse d’appui qui permette au nageur de s’accélérer (les bras offrent la possibilité d’accélérer la masse d’appui dans la direction du déplacement et en sens inverse à une vitesse supérieure à la vitesse de déplacement).

Pour quelle raison le battement s’intensifie quand le nageur s’accélère plus intensément à l’aide de ses bras ? A quoi sert le battement, quelle est sa fonction ?

Dans l’hypothèse ou l’action des jambes est coordonnée et subordonnée à l’action des bras et que la fonction des jambes est de maintenir aligné l’axe du corps sur l’axe de déplacement alors que le propulseur bras s’écarte du plan sagittal pour pulser la masse d’eau.

Est-il préférable d’agir sur l’action subordonnée (les jambes) ou l’action subordonnante (les bras) pour nager plus vite ?

Cordialement
#6 raymond 23-01-2018 12:01
Éloigné du site pour des raisons de santé, je tiens à remercier notre collègue M. Albertini de son apport.

Sur le fond du problème, il me semble aberrant de distinguer une natation de vitesse et une de distance. Si l'on se réfère à la "marche" l'être humain dans ses acquisitions locomotrices opère-t-il des choix ? Le marcher vite contient-il en puissance le marcher loin ? La conquête fondamentale, structurante est bien "aller loin".

Selon B. Jeu "aller à l'ile merveilleuse" prend tout son sens pour l'apprenant. L'émotion est importante dans les acquisitions fondamentales.

Raymond

Pardon, vous n'avez pas le droit pour l'instant.