Didactique

"c'est l'option pédagogique qui détermine la nature des contenus à enseigner"

Inspiration sur les appuis

 

Suite au commentaire de CC:

.... Et encore une dernière chose (je l'espère), c'est du côté du bras opposé à l'inspiration que je constate cela (inspiration côté gauche / bras droit en phase motrice).

Dans la description que notre collègue fait de ses nageurs, des indices laissent penser que ses nageurs ont été initiés au déplacement dans l’eau par la brasse.

Dans leurs parcours en crawl, il constate un appui du bras avant pendant l’inspiration.

En général la période hivernale est mise à profit pour une étude systématique de la ventilation qui permette de parcourir, sans le moindre arrêt, des distances toujours plus longues en crawl.

Pour le débutant le problème fondamental est celui de l’expiration complète. Etant donné qu’il ne modifie pas le débit il doit expirer continuellement sur le plus grand nombre impair de coups de bras pour conserver une symétrie de nage. Nager, bouche grande ouverte en expirant par le nez.

Toute une gamme de tâches est proposée dans la Natation de Demain pages 166 à 174.

Il n’est jamais trop tard pour apporter des solutions aux problèmes ventilatoires.

Il s’agit, là également d’une patiente recherche.

Nous ne doutons pas que notre jeune collègue parvienne ainsi à transformer ses nageurs.

raymond

mai 2018

 

 

DIDACTIQUE DE LA NATATION

Présentation et introduction à la projection du film DIGNE DINGUE d’EAU

Didactique de la natation en milieu scolaire

Par Robert MERAND

aux Journées Debeyre - BETHUNE octobre 1980

À l'occasion de la publication intégrale sur le site du film Digne Dingue D’Eau, nous avons le plaisir de vous proposer le texte d’introduction réalisé en 1980 par un géant de l’éducation physique et sportive et de la culture du sport, un monument de la culture tout court : Robert MERAND.

NAGER VITE !

Un OBJECTIF SPECIFIQUE CONTESTABLE

Nous avons apprécié qu’un collègue praticien nous apporte un point de vue correspondant vraisemblablement à une option. Il semblerait qu’entre nager vite et nager loin ce soit le nager vite qui organise sa séance de natation.

Il importe de nous poser la question de savoir si cette « distinction », correspond à une réalité, a un sens ou s’il s’agit d’un concept creux ?

Si l’Education nationale a emprunté à l’Université, cette pseudo « connaissance » il convient de remonter à la source de sa conception.

Lorsque le débutant aborde la locomotion dans l’eau, l’ébauche du corps propulseur se manifeste par une rotation des membres supérieurs ; leur extrémité décrivant pour chacun, un arc au dessus de la surface (retour aérien) et un arc sous la surface (phase aquatique).

L’amplitude mesure l’écart entre les points extrêmes de l’arc.

On peut alors distinguer des paramètres cinématiques de ces trajectoires que sont : l’amplitude et la fréquence. On est dans le domaine de la description.

Dans la pratique, on constate que les progrès se manifestent à travers le nombre croissant de coups de bras que le nageur est en mesure d’atteindre et de maintenir entre ses tentatives.

Les premiers essais se réalisent en l’absence d’échanges ventilatoires.

Un repère concret pour l’élève se situe dans l’espace à travers la distance parcourue. La vitesse n’est pas significative pour lui, émotionnellement (Cf. : B. Jeu) et intellectuellement.

Des progrès significatifs dans la construction de la nage seront atteints à travers l’intégration des échanges ventilatoires. Ces derniers vont la structurer.

L’attention permanente du formateur est requise pour obtenir l’amplitude gestuelle. Mais sa réalisation suppose, de la part de l’élève, une représentation et de son espace corporel dans l’eau et de son espace d’action.

On favorise la construction de ces représentations sans lesquelles il n’y a pas d’adaptation possible aux objets et buts de l’activité (Wallon), en faisant parcourir aux membres supérieurs des passages dans les plans horizontal (surface de l’eau), sagittal vertical et frontal vertical (perpendiculaire aux précédents). Ces déplacements se réalisent, simultanément, extrêmement lentement et dans le sens inverse de celui de la nage.

Les amplitudes requises pour accroître le rendement de la nage concernent aussi bien les retours (projection de l’épaule vers l’avant) que les phases aquatiques.

La fréquence étant une réaction spontanée n’est jamais à solliciter.

Les collègues entraineurs avertis connaissent les mésaventures des nageurs qui ont « volontairement » mis en œuvre la fréquence pour redouter cette attitude. Cette vision erronée est inséparable de la représentation de la propulsion du nageur impliquant l’entrée en jeu de deux moteurs.

Si cela était le cas, quel serait le subordonnant ? Est-ce parce que le nageur augmente la puissance de ses membres supérieurs que les battements entrent en jeu ? Ou est-ce que le déclenchement des battements plus intenses se répercutera sur la puissance des membres supérieurs ? Nous avons évoqué plus haut les conséquences du « mauvais choix » !

En ce qui concerne la pertinence de l’option, l’éducateur se doit d’interroger les pratiques et la logique. Dans la locomotion terrienne peut-on imaginer le bébé à qui on ne laisserait que la possibilité de la course ? Commencer par la course améliorerait-il ses compétences locomotrices ? Peut-on en envisager les conséquences sur les plans de la santé et de son développement ?

Il faut enfin citer le texte d’un authentique chercheur F. Tochon (recherche et formation INRP n° 5 P./ 25 à 38) « L‘inadéquation des logiques de formation professionnelle, tient à l’absence d’une réflexion contextualisée, en situation, et au pouvoir de l’université de dénaturer les pratiques. La réflexion sur la pratique n’a rien d’un savoir universitaire.

L’observation des mouvements du nageur à vitesse optimale ou à vitesse maximale fait apparaitre des différences de trajectoires des extrémités. A vitesse maximale le trajet s’éloigne de plan vertical contenant l’axe de déplacement (grand dorsal) tandis qu’à vitesse optimale, le même nageur fera passer son propulseur dans ce plan vertical.

Il s’agit d’une adaptation et non d’une modalité différente.

Si l’on envisage la possibilité de porter secours, ou de se tirer soi-même de difficulté, pouvoir se rendre loin du bord et en revenir est certainement plus important qu’aller vite mais pas loin !

Le débat reste ouvert.

 

raymond

 

LA VITESSE ET L’ENTRAINEUR

 

Au sens premier, la vitesse est la capacité parcourir une distance en peu de temps.

En physique c’est le rapport de la trajectoire parcourue au temps mis à l’effectuer. Il s’exprime à l’échelle humaine en m/s (mètre par seconde).

Dans la situation concrète de performance du nageur, celle-ci définit une moyenne des variations permanentes de la vitesse instantanée. Par exemple pour un nageur ayant parcouru le 100m. en 50 sec., soit 2 m.s., la vitesse instantanée de la partie aérienne aura atteint environ dix fois celle que le nageur est en mesure de réaliser dans la partie nagée et à l’issue des virages à un moins degré la vitesse aura été plus importante également.

Une préoccupation permanente de l’entraineur consiste à accroître la vitesse de nage. Pour atteindre cet objectif il semble déterminant de comprendre les mécanismes mis en jeu par le nageur pour se déplacer. Nous disons qu’il s’agit de la fonction propulsive de la locomotion dans l’eau.

Un regard sur les différentes modalités locomotrices peut nous être fort utile. La thèse de doctorat de notre collègue W. Dufour « La locomotion dans la phylogenèse » nous servira de référence.

La nage, le vol, la course ou le ramping ne sont que des procédés de locomotion imposés par les masses d’appui (eau, air, sol dur ou sable) qui résistent plus ou moins bien aux poussées.

Pour qu’un animal quelconque déplace sa propre masse à une vitesse déterminée, il faut qu’il puisse prendre appui sur une autre masse. Pout le bipède que nous sommes l’adhérence de l’extrémité du membre inférieur au sol lui procure momentanément un point fixe.

Nous retrouvons, bien sur, les trois principes de Newton qu’il convient de ne jamais isoler.

  1. le principe d’inertie ;

  2. le concept de force ;

  3. le principe d’action réaction.

Si le sol dur résiste jusqu’à devenir une masse d’appui fixe, il n’en est pas de même de l’eau, fluide incompressible qui se trouve « mis en mouvement » par les propulseurs.

Des masses d’eau se trouvent ainsi propulsées en sens opposé à celui du déplacement par les membres supérieurs dont l’extrémité s’organise en pale.

A chaque « coup de bras » plus la masse d’eau et son accélération sont importants, plus la masse du nageur se trouve proportionnellement accélérée.

Au terme de l’accélération la vitesse du nageur atteint sa valeur la plus élevée et inéluctablement, freinée par la masse d’eau à traverser, celle-ci décroit jusqu’à l’entrée en jeu du coup de bras suivant.

La pensée naïve ou magique de certains entraineurs imagine possible « d’ajouter de la vitesse » (sic) au début ou à la fin de chaque accélération. Le recours est alors fait au membre supérieur ou aux membres inférieurs (référence aux deux moteurs) juxtaposant leur mise en action. L’analyse élémentaire de ces exercices démontre leur absurdité.

Par exemple : tirer d’une main sur la ligne de nage et enchainer avec un coup de bras ; déclencher une action de jambes et lui adjoindre un ancrage pour repousser la ligne de nage (l’ancrage stoppe ou freine avant de pouvoir servir de point d’appui) ; se mettre en mouvement à partir de battements de jambes et enchainer avec un coup de bras… etc.

Y aurait-il quelque part un modèle susceptible de produire de telles représentations ? Vers le milieu du siècle dernier une automobile fut construite avec un moteur actionnant les roues avant et un moteur actionnant les roues arrière de manière indépendante. Si l’on règle le moteur avant pour atteindre la vitesse de 60 km/h et le moteur arrière pour rouler à 40 km/h,

La pensée naïve ou irrationnelle suggère que le véhicule roulera à 100 (60 + 40) km/h.

Les faits montrent au contraire que le véhicule n’atteindra plus les 60 km/h.

Pourquoi en serait-il autrement dans l’eau pour le nageur. Raisonner en terme de vitesse, c’est oublier que celle-ci est un effet, le produit, la conséquence d’une accélération.

Faute de respecter les lois de la physique des propositions incohérentes conduisent les entraineurs et les nageurs dans des voies sans issues.

raymond

janvier 2018

 

 

 

Regard INDISCRET

( une nouvelle aventure pour l’observateur impertinent )

On pourrait croire le folklore pédagogique suffisamment complet en accumulant des situations ou des exercices ne présentant aucune utilité, voire néfastes pour les apprenants sans qu’il soit nécessaire de l’encombrer de formes inédites. La suite nous prouvera que non !

Les premières heures de l’après-midi sont réservées à la natation scolaire dispensée par les MNS. Dès 16 heures c’est l’ouverture au public et la fréquentation est compatible avec la réservation de 2 lignes d’eau pour les étudiants guidés par un professeur d’APS.

Une nouvelle jeune enseignante anime ce groupe dont l’effectif ne dépasse pas les 20 garçons et filles. Si l’on excepte un cas de nageur confirmé, l’ensemble pourrait être assimilé à des débutants et certains plus novices vivent leurs premiers contacts avec la piscine.

Tandis que j’effectue des allers-retours dans la ligne d’eau voisine, par déformation professionnelle je ne puis m’empêcher d’imaginer ce que je proposerais comme tâches si je me trouvais dans la situation de ma jeune collègue. A la limite d’envisager la séance adéquate.

Manifestement la natation n’a pas été son option prioritaire ou ce serait à désespérer de la formation en STAPS. Alors, comment s’y prend-elle ?

Elle fait parcourir à ses élèves une distance sans la moindre consigne ! Lors de la dernière séance observée : partir de la grande profondeur et remonter à l’extrémité pour revenir par le bord en marchant. Les entrées à l’eau se font par les pieds en sautant ou se laissant glisser le long du bassin ou en plongeant tête au dessus des bras à l’entrée à l’eau.

Les rares séquences de nage sur le dos voient l’arrêt prononcé des mains aux cuisses et la tête sortie de l’eau entrainant l’enfoncement du bassin.

La nage ventrale alternée se caractérise par la rotation du bloc tête-épaules tandis que le respect de la consigne de la fixation de la tête immergée entraînerait, si elle était donnée et respectée, un progrès décisif dans la construction de la nage de ces débutants.

Le souci des élèves de maintenir la tête hors de l’eau a pour inévitable conséquence l’enfoncement du bassin et des poussées des avant-bras en profondeur. D’où un rendement déplorable.

Je n’ai ni vu ni entendu de consignes ventilatoires.

L’utilisation du matériel donne lieu à des situations pour le moins originales. Si j’ai bien observé la démonstration à sec : la jeune collègue maintenait la planche entre les cuisses en exécutant des rotations du bassin selon le grand axe du corps. Pour les élèves ayant la tête hors de l’eau, faire pivoter cette planche se révélait particulièrement complexe et pour beaucoup irréalisable.

Il serait fastidieux de détailler les « curiosités » de cette séance, mais je ne puis omettre de vous dire l’exercice le plus original.

Chaque élève disposait de sa planche à battements tenue à l’horizontale. Sur chacune notre collègue a déposé l’extrémité antérieure un gobelet en carton. L’exercice consistait pour les étudiants à pousser la planche par maintien alternatif de l’extrémité d’un membre supérieur en nage ventrale sans que le gobelet ne bascule. Je ne vous donne pas le, pourcentage de réussite!

Les MNS, témoins comme moi de cette « trouvaille » étaient sidérés.

Il n’y a pas d’enseignement sans contenu. La méconnaissance des fondements des disciplines entraine les déviations pédagogiques. Comment l’enseignant va-t-il combler ce VIDE ?

Il ira chercher dans son environnement quotidien, n’importe où, n’importe comment, l’illusion d’exercices qu’il suffirait de faire exécuter pour que l’élève progresse.

Ou alors, fera place à l’imaginaire !

raymond